Reporté une première fois de septembre 2020 à septembre 2021 puis une seconde fois de septembre 2021 à septembre 2022, ce voyage, au terme de cette longue gestation, s’est déroulé du lundi dix-neuf au samedi vingt-quatre septembre 2022 à Nice. L’hôtel du Pin *** et sa situation très centrale assura commodément notre gîte.
Quarante-huit participants ont répondu favorablement à l’invitation lancée par nos amis de l’Association Européenne des Cheminots(AEC), organisateurs de ce grand rassemblement. Allemandes, Anglais, Belges, Suisses, Espagnols et Français s’y côtoyèrent et je n’omets pas à l’effectif notre toujours souriante dame polonaise !
La Famille du Cheminot y était forte de quatorze adhérents.
Tous ceux qui sont arrivés en gare de Nice-Ville ont longé sur environ deux cents mètres une zone en travaux avant d’accéder au tramway. C’est la construction du projet Iconic, d’immenses bâtiments de ferraille et de verre, aux hautes allures tarabiscotées et aux arêtes saillantes. Il faut certes vivre avec son temps, mais pour accompagner le voyageur de la gare au tramway n’y avait-il pas plus simple et moins agressif ? Le beau bâtiment « voyageurs » de la gare PLM de Nice-Ville sera désormais dénaturé par cet envahissant voisinage qui en altérera toute sa somptueuse monumentalité.
La ville hôte est découverte à pied. Une guide énergique et passionnée par l’histoire de sa cité nous conduit a travers le vieux Nice, Ce triangle entre mer, château et Paillon offre un dédale de ruelles animées, bordées de maisons hautes aux teintes ocrées. Sur les fenêtres et les balcons, du linge sèche à l’occasion. La cathédrale Sainte-Réparate et les nombreuses églises ont adopté le style baroque. La belle lumière d’été qui nous accompagne en fait briller leurs ors. Passage obligé pour tous les visiteurs croyants ou non : la chapelle de l’Annonciation où se voue un culte à Sainte-Rita. Cette sainte italienne du quinzième siècle est invoquée pour dénouer les situations désespérées. Et elle y accède avec succès tant les murs du sanctuaire débordent d’ex-votos ! Une héroïne plus laïque possède aussi son monument dans le vieux Nice : Catherine Ségurane. En 1543, lors du siège de Nice par les Turcs, elle mit en fuite les soldats ottomans en manipulant avec adresse et vigueur son battoir à linge. Ce geste de bravoure lui permit aussi de capturer un drapeau ennemi flanqué du croissant. Légende ou pas : on dit aussi qu’elle releva ses jupes de lavandière et montra ses parties les plus charnues aux soldats assaillants, provocant ainsi la plus ample débandade (!) des troupes musulmanes. Mais c’est la tête que nous devons dresser pour découvrir une représentation d’Adam et Ève dans cette venelle étroite devenue succursale de l’Eden. Sur la place Saint-François, le marchand de poissons fait face à une mairie des temps anciens, déclassée aujourd’hui en bourse du travail.
Aventurier, baroudeur, militaire et finalement héros local, Giuseppe Garibaldi trône au milieu de la place éponyme. Sa statue monumentale habille et structure ce vaste quadrilatère planté de chênes verts et d’albizias. La ligne une du tramway traverse ce bel ensemble architectural. Mais aucune ligne aérienne n’en dégrade les perspectives. En effet des batteries à recharge rapide assurent l’alimentation électrique de la rame quand la caténaire est absente et les pantographes baissés. Les lignes filaires n’ont pas été posées en certains endroits notamment pour laisser toute liberté en hauteur aux chars du célèbre carnaval niçois.
Pendant notre séjour se tient le procès de l’attentat de Nice (délocalisé à Paris). La promenade des Anglais, a ajouté à sa célèbre renommée touristique le pénible souvenir de ce quatorze juillet 2016. Deux mémoriaux récemment inaugurés rappellent ce tragique épisode.
Un tour de la ville en autocar panoramique s’achève à la confiserie Florian. Une aubaine pour les gourmands !
La gare des Chemins de Fer de Provence (CP) paraît bien menue par rapport au monumental bâtiment du Sud-France, toujours debout, remarquablement restauré et occupé par diverses enseignes de restauration. Des autorails stationnent sur les trois voies à quai. On y voit l’X 307 propriété des chemins de fer corses (CFC) mais loué à son voisin continental à voie métrique. Sur la voie d’à côté l’X 301 possède tous les attributs et marquages des CP. Il attend les voyageurs. Ces matériels faiblement capacitaires assurent un important et dense trafic de banlieue jusqu’à Saint-Martin-Plan-du-Var. Enfin il y a ‘‘notre’’ train, assuré par le bleu AMP 805, matériel bi-caisse le plus récent, fabriqué à Bagnères-de-Bigorre, pelliculé aux armes de la région Sud et flanqué d’un grand ZOU (dénomination du réseau de transport en commun de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur). Alors zou ! et direction Entrevaux.
Toujours spectaculaires à franchir en pleine ville de Nice : les deux passages à niveau sans barrière et dotés seulement de feux et de sonneries. Moins spectaculaire -hélas- le médiocre débit d’eau dans le Var et ses principaux affluents : Tinée et Vésubie. Bien que la vitesse en ligne ne soit pas élevée, il n’a échappé à personne que notre autorail partait en ’’danseuse’’ sur les tracés rectilignes. Ah lacets et suspensions, nous connûmes cela il y a bien longtemps !!
Une guide nous attend sur le quai de la gare d’Entrevaux et va nous faire visiter le village blotti au pied de sa citadelle : portes et pont fortifiés, ruelles anciennes, maisons aux vastes volets, cathédrale, four banal, défenses du système Vauban et commerces d’antan en sont les points de passage obligés. Les plus motivés d’entre nous entreprennent la montée à la citadelle. La-haut la vue est spectaculaire et la bise bien froide. D’autres moins attirés par l’altitude visitent le musée de la motocyclette. Leurs commentaires sont flatteurs sur la présentation et parfois la rareté des ‘‘bécanes’’ exposées.
L’accès en principauté de Monaco par la voie maritime est une originalité dont il faut remercier l’organisateur de notre rassemblement. C’est au port de Fontvieille, quartier gagné sur la mer au siècle dernier que nous débarquons. Là, chacun, se met alors en route à son rythme pour accéder au Rocher, flâner par ci, musarder par là, gravir la rampe Major et enfin arriver sur la place du Palais. Ici, il faut se positionner du mieux possible afin de ne pas manquer une miette du cérémonial de la relève de la garde du palais princier. C’est un spectacle coloré, musical et ponctué d’ordres brefs. En outre la vingtaine de carabiniers cédants et montants ne sont pas avares du cliquetis de leurs armes.
Du belvédère rocheux, on domine Monte-Carlo et le port Hercule. Sur terre, des grues de construction sont hérissées et élèvent encore des immeubles sous les cieux monégasques. Sur l’eau finalement peu de yachts somptueux. Les oligarques russes ont-ils fui ? Et ‘‘nos grandes fortunes’’ ont-elles levé l’ancre face aux critiques écologistes ?
Il faut montrer patte blanche pour pénétrer dans le Palais princier. La somptueuse galerie d’accueil décorée de multiples fresques, les appartements luxueusement meublés et la salle du trône sont successivement visités. La cour d’honneur et son escalier à double révolution achèvent la visite.
Le retour à Nice par la même voie maritime s’opère au soleil couchant et en longeant du plus près possible les reliefs de la côte. Pour que nous en apprécions les détails, notre vedette file à l’allure paisible d’une douzaine de nœuds. Un matelot commente le panorama, en désigne les hôtels et les villas les plus cossus et fait part de quelques anecdotes.
Le vieux village d’Èze, perché sur un piton dominant la mer, ne manque pas d’attraits. Il est agréable d’y flâner. D’un avis commun à tous les visiteurs et pour la sauvegarde du patrimoine, l’église paroissiale Notre-Dame-de-l’Assomption mériterait sans retard une campagne de restauration. Des affiches municipale et diocésaine portant appels aux dons sont d’ailleurs apposées dans la nef.
Le cimetière compte un pensionnaire célèbre : Francis Blanche. Sa tombe est simple mais l’épitaphe est cocasse : Laissez-moi dormir, j’étais fait pour ça.
Galimard et Fragonard, les deux célèbres parfumeurs ont pignon sur rue dans la localité. À qui rendre visite ? L’organisateur a choisi : c’est Fragonard qui tire le pompon et fait donc l’objet de notre découverte. La plupart des fleurs et des fruits méditerranéens fournissent localement les fragrances nécessaires aux préparations. À travers les deux niveaux de la moderne usine-laboratoire, une hôtesse nous initie aux secrets de la savonnerie et des cosmétiques. Des tests de senteurs nous sont proposés. Chacun mesure à cet effet que n’est pas nez qui veut ! En fin de parcours, la boutique à prix d’usine nous retient tous. La gratuité d’accès est largement compensée par les recettes commerciales qui s’ensuivent. Dans ce domaine-là, Fragonard est drôlement au….parfum !
Les restaurants nous ayant reçus à l’occasion de nos déjeuners méritent d’être nommés pour les agréables souvenirs gustatifs de leurs mets et félicités pour la rapidité de leur service. La Piccola Italia dans le vieux Nice, le Planet à Entrevaux, l’Aurore à Monaco (où dit-on le prince souverain a aussi son rond de serviette) et le Pinocchio à Èze. Les consommations y ont coulé sans entrave et le vin rosé est largement arrivé en tête des boissons favorites.
Merci à Pierre Laberny et à toute l’équipe de l’AEC pour ces bons moments conviviaux vécus à Nice.
Textes & Photographies : Jean-François REYNIER